Près de 5 mois après avoir déposé le président élu lors d’un coup d’état et alors que les conditions sécuritaires se détériorent davantage, le colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, chef de la transition, a entamé des contacts tout azimut dans l’espoir de mettre un terme aux attaques armées répétées dans plusieurs régions du pays que les autorités ne contrôleraient plus qu’à 60%, selon le médiateur de la CEDEAO et ancien président nigérien Mouhamedou Issoufou.
Les efforts déployés par le colonel Damiba pour mettre fin aux violences dans le pays, notamment dans les régions Est et Nord, ont commencé avec une rencontre hier mardi, au palais présidentiel de Ouagadougou, avec le chef de l’état renversé, Roch Marc Christian Kaboré et l’ancien président Jean Baptiste Ouédraogo qui a dirigé le pays de 1982 à 1983.
Les deux anciens chefs d’état ont eu droit aux honneurs officiels à leur arrivée au palais présidentiel, voitures officielles et tapis rouge en plus de sourires et discussions amicales devant les caméras, avant d’évoquer, autour de la table, la question sécuritaire et la transition dans le pays après le coup d’état de janvier dernier.
Dans un communiqué qu’elle a publié, la présidence du Burkina a dit que cette rencontre consacre le début d‘une série d’activités destinées à mettre fin aux tensions qui caractérisent la situation politique dans le pays, réaffirmant que cette rencontre témoigne de la volonté de Damiba de parvenir à une réconciliation afin de réunir le pays et lutter contre les dangers du terrorisme.
Le communiqué la présidence n’a pas évoqué les conseils prodigués par les deux présidents à Damiba, mais celui-ci a écrit sur sa page Facebook que « cette rencontre constitue une étape majeure sur la voie de l’unité du pays » avant de louer la contribution des deux anciens présidents à la construction de l’unité nationale, la réconciliation et la solidarité ».
Cette rencontre avec les anciens chefs d’état est intervenue un jour seulement après une réunion du conseil supérieur de la défense à laquelle ont assisté les chefs militaires et qui a été consacrée à « la situation sécuritaire inquiétante », selon la présidence de la république.
Au cours de cette réunion , le conseil a pris un ensemble de mesures pour une meilleure dynamique lors des opérations contre les groupes armés dont la création de deux régions militaires dans le nord et l’Est du pays, proches des frontières nigériennes et maliennes, où les groupes armés, affiliés à Al Qaida et Daech, sont particulièrement actifs.
Selon la direction des opérations de l’armée du Burkina, la création de ces deux régions militaires « entre dans le cadre des mesures de défense du territoire national ».
Elle a mis en garde contre toute présence ou activité humaine dans ces régions qui couvrent une superficie de 50 kilomètres carrés, révélant que de vastes opérations militaires vont être entreprises prochainement.
La direction des opérations a donné un délai pour les populations de ces régions, dont elle n’a fixé ni la durée ni le début, afin qu’elles les évacuent vers des zones sûres, qui vont être déterminées, selon l’agence Reuters citant une source militaire.
Face à la baisse des performances de certains membres des forces de défense et les forces auxiliaires et l’abandon de leurs positions face aux attaques armées, qualifié de « comportement contraire à l’éthique de l’armée, » le commandement d’état-major a menacé de prendre des mesures fermes à l’encontre de ceux-ci.
Le commandement de l’état-major a condamné « le comportement irresponsable » de certains membres des forces de défense et les forces auxiliaires, ajoutant que ces comportements peuvent être à l’origine à l’absence de la sécurité dans certaines zones et de représailles.
Il ajoute que les chefs de l’armée, de la gendarmerie et de la police ont reçu des instructions pour prendre toutes les mesures fermes face à ces comportements.
Dans un autre communiqué, l’état-major a appelé les forces armées et de défense à s’armer d’un esprit combatif et à de ne pas abandonner leurs positions une fois attaquées », mais plutôt à les défendre vaillamment.
Il a été également crée une unité de contrôle et de défense nationale chargée de la coordination des opérations de défense et de renseignement relevant du ministère de la défense.
En avril dernier, lors d’une visite à Bobo Dioulasso, Damiba avait affirmé qu’il comptait seulement sur l’armée nationale pour sécuriser le pays et que le salut ne viendrait pas de l’étranger.
Ces initiatives successives du président de la transition au Burkina, interviennent au moment où se multiplient les attaques des groupes armés, alors qu’il avait promis de présenter au peuple burkinabé le bilan dans 5 mois lors d’un discours au mois d’avril dernier.
Le dernier lourd bilan des confrontations était de 86 victimes civiles dans la localité de Sytiniaga le 11 juin, une attaque qui a jeté sur les routes 6000 personnes en direction des villes voisines.
Cette attaque avait entraîné la colère de la classe politique et la société civile du Burkina Faso et mis sur la table l’efficacité de la stratégie des autorités militaires pour restaurer la sécurité et mettre fin aux attaques terroristes, alors que le pays est dirigé par des militaires arrivés au pouvoir à la faveur d’un coup d’état contre un président civil suite à la colère populaire après son échec d’instaurer la sécurité.